C’est un sacré méli-mélo le tango : non seulement dans les pas, les figures, les distorsions, s’élever vers le ciel et s’ancrer dans la terre, mais c’est aussi un méli-mélo de par ses origines. Le tango argentin est un enfant des pauvres gens qui serait passé, à un moment de son histoire, dans le monde des bourgeois, des bourgeois parisiens notamment puis serait revenu dans le milieu intellectuel, artistique pour sa plus grande gloire et après une parenthèse tragique aurait conquis la middle classe, les bobos !

Depuis son commencement, le tango est fait d’allers-retours : allers-retours géographiques, artistiques, sociaux. C’est pour cela qu’il a besoin de deux jambes et pas seulement pour danser. Certes, la danse est magnifique, unique, mais trop de danses peuvent le tuer. Les jambes d’immigrants venues d’Europe après des jours et des nuits de traversée, les jambes enchaînées d’esclaves africains, les jambes de gaucho et celles qui écrivent les poèmes, celles qui composent à la guitare ou au bandonéon, celles qui résistent, celles qu’on emprisonne et celles qui renaissent : l’histoire des jambes du tango n’est pas faite que de danses.

 Des pas, des pas, oui et des passeurs aussi…

Des passeurs de tango. Ils sont nombreux aujourd’hui à vouloir sauvegarder, transmettre, offrir l’histoire, le poème oublié, le témoignage du vieux bandonéoniste, la partition jamais interprétée… Cinéastes, écrivains, musiciens, historiens, biographes, mais aussi associations, revues, etc. participent à ce mouvement qui donne à voir, à écouter, à montrer toutes les richesses de cette incroyable culture qui nous aide, qui nous construit, qui participe à notre vie.

Photo : Gilles Franqueville