à Julia y Andrès Ciafardini

Je pénètre dans le couloir et j’entends déjà les accords. «Viens, viens, me dit-il, c’est Di Sarli, je le mets toujours l’après-midi». J’écoute et je marche lentement. C’est le Tango, bien sûr, quoi d’autre, qui nous guide dans ce voyage.
«Viens, viens, assieds-toi, qu’est ce que tu veux savoir ?
– Un peu tout de vous Monsieur, je réponds, c’est pour ça que je suis là.
– Ah bon ?
– Mais si ! Je vous ai prévenu, le tango, votre métier, les costumes, les danseurs, votre histoire enfin… !
– D’accord, d’accord. Comment j’ai commencé dans le métier ? Eh bien… deux danseurs, Soto y Cejas, sont venus avec des pièces de toile pour que je leur confectionne un costume. Voilà, c est parti ! Après, tu sais, les gens parlent…» Il sourit. Il sait qu’il est doué, mais il reste toujours modeste.

Florindo Brindesi entrevoit déjà ses 80 printemps, mais il travaille toujours. Jour après jour, même 12 heures par jour. Je le regarde et je lis toute une histoire sur son visage. Il me montre son atelier et je découvre, immobiles, ses outils. «Tout appartenait à mon père, il y a même des choses qui étaient à mon grand-père». Cholo, troisième génération de tailleur, persiste encore dans cet art. Il coud, il coud, et les gens viennent toujours le voir. Il a toujours habité le quartier porteño de Boedo, toujours habité la même maison et toujours pratiqué ce métier… pendant plus de 60 ans. Sa femme acquiesce et lui, comme ça, se met à parler de ses débuts : à peine terminé l’école primaire, il s’y est mis. Son père lui avait demandé s’il voulait continuer à étudier ou bien le rejoindre à l’atelier. Il n’a pas hésité. Il a choisi sa destinée très tôt dans la vie.

«Le tango, autrefois ? Il se passe la main sur le front, réfléchit… On en parlera plus tard.»
A suivre…
Reportage et Photos Martin Suya